TERROIR…
C’est un mot que l’on met à peu près à toutes les sauces aujourd’hui. Un mot qui le plus souvent ne veut pas dire grand-chose, il faut l’admettre. À moins de prendre le temps de l’expliquer sur le terrain. Intraduisible à l’étranger, de mon côté je parlerais plus volontiers de « cru ». Mais attention, ce n’est pas parce que l’on a la chance d’être sur un grand terroir que l’on fera de grands vins. Chez moi, par exemple, j’ai pu repérer quatre crus notoires, mais j’en ai d’autres en réserve qu’il faut que je prenne le temps de découvrir, de comprendre !
Car tout est là : le sens vrai du terroir, c’est une combinaison de données complexes et de mystères qui sont liés au temps.
Pourquoi les moines au Moyen âge travaillaient la vigne là et pas à côté ? Pourquoi, des centaines d’années après, le vin de cet endroit est bien plus profond qu’en d’autres lieux ?
C’est le mystère tout entier du terroir.
Lorsque je fais visiter le vignoble du Clos des Montys, sur les hauts de Goulaine, j’explique sans difficultés – et ça se voit presque à l’œil nu -, les différences de mes deux parcelles, celle qui est plus argileuse et l’autre qui est plus caillouteuse. Donc, avant de parler de terroir, il faut se faire expliquer puis potasser un peu la géologie car, dans ce cas, je suis face à deux parcelles, sur une même entité qui vont me donner sans avoir besoin de trop intervenir, deux expressions totalement différentes. Je complexifie encore plus les données lorsque, sur la vigne caillouteuse je décide d’isoler environ un hectare planté en très vielles vignes (1914).
On voit que sous le vocable « terroir », il y a une base constituée par le sol, le sous-sol, l’environnement, le climat que nous ressentons ici fortement de par notre proximité avec l’océan et la Loire.
Mais sans être prétentieux, cela ne suffit pas. L’intelligence du vigneron, de génération en génération, son sens de l’observation, les promenades incessantes qu’il fera dans « ses » terroirs, l’entretien et le respect le plus total de la vie microbienne de la terre (cela exclut les produits chimiques), vendanges manuelles, l’âge de la vigne, la façon dont elle a été soignée, son remplacement lorsqu’elle décède, afin de maintenir l’intégrité du lieu, il y a quantité de paramètres qui fondent la notion de terroir. C’est ainsi que j’ai pu repérer, avec la complicité de mon père, mes plus belles terres, réparties sur les secteurs de Château-Thébaud et de Clisson. Tout le sens du travail de base d’un vigneron, où qu’il soit, réside dans cette volonté.
Observer et agir avec réflexion et lucidité pour vinifier un vin complexe et intéressant : un vin vivant.
Alors, dans ce cas, le vigneron peut se dire, non sans fierté, qu’il contribue à maintenir en vie un patrimoine viticole historique. Et qu’il fait par la même occasion le plus beau métier du monde!
Depuis maintenant quelques années je me suis associé à Jérémie Mourat, vigneron en Loire Méridionale. De notre complicité naissent aujourd’hui 4 cuvées du Muscadet : signées les Bêtes Curieuses.
Nous mettons en commun notre passion pour les grands vins blancs de Loire et notre vision que nous souhaitons moderne et respectueuse de nos terres.